Le débat Guyau-Durkheim sur la théorie sociologique de la religion. Une nouvelle querelle des universaux ?

En 1887, deux jeunes philosophes - Jean-Marie Guyau et Émile Durkheim - engagent une controverse sur la nature de la religion. Alors que chacun reconnaît aux religions un caractère (pour employer le néologisme de Guyau) profondément « sociomorphique » - c’est-à-dire, qu’elles sont des représentation...

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Published in:Archives de sciences sociales des religions
Main Author: C. Behrent, Michael (Author)
Format: Electronic Article
Language:French
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Published: Ed. de l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales 2008
In: Archives de sciences sociales des religions
Further subjects:B sciences religieuses
B Individualismo
B Religious Studies
B Durkheim (Emile)
B ciencias religiosas
B Individualism
B Société
B Durkheim
B Guyau (Jean-Marie)
B Sociedad
B Durkheim (Émile)
B Individualisme
B Society
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Summary:En 1887, deux jeunes philosophes - Jean-Marie Guyau et Émile Durkheim - engagent une controverse sur la nature de la religion. Alors que chacun reconnaît aux religions un caractère (pour employer le néologisme de Guyau) profondément « sociomorphique » - c’est-à-dire, qu’elles sont des représentations idéalisées des sociétés où elles voient le jour - ils divergent quant à la question essentielle de ce qu’il faut entendre par la « société ». Ce désaccord reformule en termes sociologiques la « querelle des universaux » médiévale : Guyau comprend la société de manière « nominaliste », n’y voyant qu’un mot pour désigner des assemblées où seuls les individus sont réels, alors que le « réaliste » Durkheim affirme que la société existe par-delà les individus qui la constituent. La convergence entre les notions de « religion » et de « société » dans ce débat suggère que le projet de fonder une science laïque de la religion était profondément marqué par des ontologies sociales jaillissant de l’expérience de la modernité politique, ainsi que par les apories constitutives de l’idée d’une « société d’individus ».En 1887, deux jeunes philosophes - Jean-Marie Guyau et Émile Durkheim - engagent une controverse sur la nature de la religion. Alors que chacun reconnaît aux religions un caractère (pour employer le néologisme de Guyau) profondément « sociomorphique » - c’est-à-dire, qu’elles sont des représentations idéalisées des sociétés où elles voient le jour - ils divergent quant à la question essentielle de ce qu’il faut entendre par la « société ». Ce désaccord reformule en termes sociologiques la « querelle des universaux » médiévale : Guyau comprend la société de manière « nominaliste », n’y voyant qu’un mot pour désigner des assemblées où seuls les individus sont réels, alors que le « réaliste » Durkheim affirme que la société existe par-delà les individus qui la constituent. La convergence entre les notions de « religion » et de « société » dans ce débat suggère que le projet de fonder une science laïque de la religion était profondément marqué par des ontologies sociales jaillissant de l’expérience de la modernité politique, ainsi que par les apories constitutives de l’idée d’une « société d’individus ».
In 1887, two young philosophers - Jean-Marie Guyau and Emile Durkheim - became involved in a debate on the nature of religion. While both held religions to be (to use Guyau’s neologism) profoundly "sociomorphic" - that is, that they are idealized representations of the societies in which they were born - they diverged on the essential question of what should be meant by "society". This disagreement reformulated, in sociological terms, the medieval "Quarrel of the Universals": Guyau understood society in a "nominalist" fashion, seeing it as a word for designating groups in which only individuals are real, whereas Durkheim, as a "realist", affirmed that society exists above and beyond the individuals that constitute it. The convergence between the notions of "religion" and "society" in this debate suggests that the project of founding a secular science of religion was deeply tied to social ontologies arising from the experience of political modernity, as well as to the constitutive aporia of the idea of a "society of individuals".
En 1887, dos jóvenes filósofos -Jean-Marie Guyau y Emile Durkheim- abren una controversia sobre la naturaleza de la religión. Mientras que ambos reconocen a las religiones un carácter (para emplear el neologismo de Guyau) profundamente "sociomórfico" -es decir, que son representaciones idealizadas de las sociedades donde nacen- los filósofos se diferencian en cuanto a la cuestión esencial de lo que se entiende por "sociedad". Este desacuerdo reformula en términos sociológicos la "querella de los universales" medieval: Guyau entiende a la sociedad de manera "nominalista", viendo en ella apenas una palabra para designar asambleas en las que sólo los individuos son reales, mientras que el "realista" Durkheim afirma que la "sociedad" existe más allá de los individuos que la constituyen. La convergencia entre las nociones de "religión" y "sociedad" en este debate sugiere que el proyecto de fundar una ciencia laica de la religión estaba profundamente marcado por ontologías sociales que brotan de la experiencia de la modernidad política, así como por las aporías constitutivas de la idea de una "sociedad de individuos".
ISSN:1777-5825
Contains:Enthalten in: Archives de sciences sociales des religions
Persistent identifiers:DOI: 10.4000/assr.13463